Les silex de Genevrois...

Publié le par Michel Aêt

Une fin d’après-midi de mai, à l’heure où l’envie saisit parfois le villageois de quitter sa maison pour prendre la clé des champs...

La tombée de la nuit est encore lointaine et les nuages chassés par un vent puissant laissent soudain place à un soleil inattendu.

La voiture conduit lentement depuis VSD jusqu’à l’intersection de la route de Bézu et de celle de Crouttes, peu après la sortie du bois de Villiers, une fois franchies la vaste étendue des Garennes.

Là, à ce carrefour situé sous les premières frondaisons du bois de Bézu, il faut tourner à gauche et peu après prendre à droite
sur 150 mètres le chemin de terre chaotique qui mène à des pâtures et arriver à une seconde intersection.

Se garer là et descendre à droite à travers les vignes en gardant le regard fixé sur un horizon d’une composition des plus harmonieuses : le territoire vallonné, où alternent bois et prés, s’étend à perte de vue et fait du village de Bézu-le-Guéry, qu’on embrasse du regard à main droite, une sorte de petit havre, où l’œil retrouve après les perspectives d’une campagne tout en profondeur, le charme apaisant de ses maisons resserrées autour de leur petit clocher, modeste mais d’allure pastorale en ce qu'il veille sur ses brebis de pierre.

Le promeneur arrive après sa descente dans les vignes, à la route qui mène de Bézu à Méry-sur-Marne, à hauteur de deux chalets qui la bordent de part et d’autre : il lui est conseillé de prendre à gauche et de longer la route sur 500 mètres pour arriver à l’embranchement qui ouvre l’accès au hameau de Genevrois (1). De la route s’aperçoit le hameau mais d’abord un joli lavoir situé en contrebas, dont la belle charpente cache un bassin vide, bien que l’eau coule dans le petit ru qui le borde.

A gauche, dans la montée vers le hameau, une maison bien restaurée et ses dépendances témoignent du renouvellement de la vie dans cet écart pourtant isolé au fond de son vallon : deux gros pick-up sont stationnés devant l'entrée; l'american way of life atteint même nos hameaux...

Face à lui, le marcheur trouvera ensuite, comme consubstantiellement entremêlées dans un mélange indémêlable de vie et de mort, les ruines d’une ferme et une petite bâtisse encore habitée, dont les fenêtres sont ouvertes.

La petite route vicinale tourne alors à gauche et mène à la grande ferme briarde, dont s’aperçoit la cour carrée derrière le porche ouvert.

Une tour carrée, dont il faut admirer les pierres d’angle qui la datent (XVIème siècle ?), rappelle l’ancienneté de la présence humaine à Genevrois, sans doute dès le haut moyen âge et probablement bien avant déja.

On peut longer le jardin potager et d'agément  - splendide - ceint de murs de pierre qui sépare le chemin de la ferme, puis trouver à monter vers les champs par un chemin de terre traçant entre céréales et colzas une ligne oblique sur l’horizon maternel de la colline.

Il faut marcher quelques centaines de mètres avant de bifurquer sur la droite et descendre vers le fond de vallée, le village de Bézu-le-Guéry vous faisant face, au Nord.

Là la descente n’est rien moins que sublime : les pierres du chemin sont des silex tous plus surprenants à découvrir les uns que les autres, dont certains, à bien les observer dans le creux de la main, semblent avoir été taillés pour la chasse ou les besoins domestiques il y a dix mille ans ; deux noyers centenaires aux troncs gris clair creusés de ravines sont les jalons de cet itinéraire puis, plus bas, un acacia probablement enraciné là depuis l’Empire fleurit imperturbablement, presque juvénile dans son panache blanc de fleurs odorantes.

Le chemin s’arrête là, en lisière d’un champ bordé de bois.

Il est temps de remonter vers le hameau de Genevrois, et de revivre une seconde fois, avec bonheur, les sensations de l’aller…

…un dimanche après-midi de mai 2007, sans avoir croisé âme qui vive en deux heures d’une promenade en quelque sorte intemporelle, depuis les hauteurs de Villiers-Saint-Denis qu’on regagne l’esprit encore imprégné de ces visions champêtres engrangées au fil de la route.

C'est ici, et nulle par ailleurs...


(1) la carte de randonnée adaptée à cet intinéraire est la  carte IGN 2513 E (www.ign.fr)
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